Corneille était l’invité du journal télévisé de RTL info. Le chanteur raconte dans un livre les circonstances dramatiques du décès des membres de sa famille lors du génocide au Rwanda. Une autobiographie intitulée « Là où le soleil disparaît ». Christophe Giltay a rencontré l’artiste.
Son drame personnel a longtemps hanté ses chansons. A 39 ans, Corneille expose pour la première fois ses blessures dans un récit qui vient de sortir en librairie et où il revient sur le génocide rwandais qui a décimé sa famille au grand complet. Le chanteur de nationalité canadienne, connu pour ses tubes « Parce qu’on vient de loin » et « Seul au monde », a longtemps hésité avant de prendre la plume et dit avoir eu besoin de cinq années pour finir son autobiographie « Là où le soleil disparaît ». Principale difficulté: écrire sur l’assassinat quasiment devant ses yeux de ses parents, frères et sœur, drame dont il est l’unique rescapé.
« Je savais la polémique que ça pouvait créer »
« Je me suis senti le devoir de m’expliquer. J’ai l’impression que je représentais une énigme aux yeux des gens et qu’il fallait l’élucider« , a confié Corneille à Christophe Giltay. Le chanteur explique que sa famille n’a pas été victime du génocide tutsi perpétré par le régime hutu, mais tuée par les troupes du FPR du président Kagamé. « Je n’ai jamais parlé de ça précisément car je savais la polémique que ça pouvait créer et aussi parce que il y a des gens qui peuvent se servir de ça pour dire: ‘Ah mais vous voyez qu’il y a une autre version de l’histoire’« , détaille le chanteur.
« Ça ne change en rien le fait que le génocide ait bien eu lieu »
Le paradoxe c’est qu’ensuite, Corneille a été sauvé des génocidaires qui le prenaient pour un Tutsi par d’autres génocidaires. « Les bourreaux à quelques exceptions étaient des sauveurs aussi. Mais ça ne change en rien le fait que le génocide ait bien eu lieu et que des centaines de milliers de Tutsis ait été tués pour le simple fait d’avoir été des Tutsis« , tient à préciser l’artiste.
Il évoque la culpabilité du survivant
Pour décrire ce moment atroce d’avril 1994, il a choisi de ne pas s’appesantir même s’il n’élude rien. Avec pudeur, il évoque la culpabilité du survivant, de celui qui n’a pas pu protéger sa petite sœur, et dialogue au fil des pages avec ses parents morts, leur demandant conseils et avis divers. Tout au long du livre, Corneille dialogue avec son père assassiné. « Je lui parle de plus en plus depuis le livre. J’ai trouvé dans ces dialogues une façon de régler mes comptes avec lui, je lui en veux car il n’a pas vu les signes. Il ne nous a pas sorti du pays avant que ça pète. C’est une façon de faire la paix avec lui« , ajoute Corneille.
Après le cauchemar, la résilience
Après le cauchemar, la résilience. C’est ce que raconte aussi Corneille, de son vrai nom Cornelius Nyungura, évoquant son parcours d’orphelin contraint à 17 ans de fuir le Rwanda (il n’y remettra jamais les pieds). Suivra la naissance de sa vocation artistique et son installation au Canada, où il est désormais marié et père de famille.
Sur 300 pages, le chanteur revient sur ses années de succès (« Parce qu’on vient de loin », sorti début 2003, s’est écoulé à près d’un million d’exemplaires), le vertige qui va avec, puis les échecs. Sincère, il n’élude rien: ni le mal-être qui le conduit sur le divan d’un psy, ni les abus sexuels dont il a été victime enfant, ni les doutes professionnels.
« Justice a été faite »
« La blessure ne m’empêche pas d’être bien dans ma vie. Je dirais même que la vie m’a rendu ce que j’avais perdu et en ce sens, justice a été faite« , conclu l’homme de 39 ans.